C’est avec une profonde tristesse que j’ai appris ce matin la disparition de Monsieur Jean-Laurent Cochet, il avait 85 ans et cette terrible épidémie que nous vivons en ce moment lui a été fatale.
J’ai suivi ces cours pendant 5 ans et son enseignement a été une révélation… C’est lui qui m’a permis de découvrir mon chemin artistique et qui m’a offert toutes les clefs de mon apprentissage. Nous sommes beaucoup à lui devoir d’être les artistes que nous sommes, connus ou moins connus.
J’ai quitté le cours en 1995 mais j’ai toujours éprouvé le besoin, non seulement d’aller le voir jouer dés qu’il se produisait, mais aussi de garder le contact avec fidélité. Je l’avais vu le vendredi 11 octobre dernier. Il était très fatigué, mais j’avais promis de passer rapidement chez lui sur son invitation. Je préparais le spectacle de « S3Odéon » durant lequel j’avais prévu de dire le « Enivrez-vous » de Charles Baudelaire et je lui demandais conseil et lui soumettait mes idées et je l’écoutais…Toujours. C’était presque comme il y avait 25 ans et que nous répétions chez lui les spectacles dans lesquels il avait eu la bonté de nous distribuer à ses cotés.
Je mesure aujourd’hui encore d’avantage la chance unique que nous avions. Je mesure la chance unique d’être son élève. La chance unique qu’il a été d’être la réponse à mes aspirations artistiques de mes 25 ans de jeune homme timide attiré par l’Art Dramatique mais trop complexé pour pouvoir imaginer un jour que des gens pourraient avoir envie de m’entendre sur scène. Je suis reparti en ne voulant pas croire que c’était peut être la dernière fois que je l’embrassais…
Je souhaite à chaque artiste d’avoir la chance un jour de croiser un Maître aussi fondateur que lui. Il était LE Théâtre. Il était mon Maître et mon père de théâtre. Je n’en aurai pas d’autre. Il le savait. Je m’efforcerai toute ma vie d’en être digne et de lui rendre hommage dans ma pratique. Il aura toujours sa place dans mon paradis*. Désormais, ils seront deux…
Sans lui, j’aurai sans doute raté quelque chose de moi-même.
*Dans un théâtre, le paradis est le dernier étage au-dessus des loges et des balcons.
Mardi 7 avril 2020 – Christophe Lavalle